Vous avez peut-être reçu un courrier d’Enedis vous réclamant une somme de plus de 1 300 euros à régler immédiatement. Rien ne préparait à une telle surprise, surtout lorsqu’aucune fraude volontaire n’a été commise. Pourtant, c’est une réalité à laquelle sont confrontés des milliers de foyers. Que se passe-t-il exactement avec le compteur Linky ? Pourquoi ce montant précis ? Et êtes-vous concerné ? Voici ce que vous devez absolument savoir.
Pourquoi recevez-vous un courrier d’Enedis réclamant 1 359 € ?
Depuis quelque temps, Enedis intensifie ses contrôles sur les compteurs Linky. Selon le gestionnaire du réseau électrique, plus de 100 000 compteurs auraient été piratés en France en trois ans. Une fraude massive, souvent organisée via les réseaux sociaux, qui utilise des dispositifs appelés « shunts » pour détourner l’électricité avant qu’elle ne soit mesurée.
Le préjudice est lourd : plusieurs centaines de millions d’euros selon Enedis. Ces pertes ne sont pas gratuites : elles pèsent sur l’ensemble des consommateurs via le Tarif d’utilisation du réseau public d’électricité (Turpe). En réponse, Enedis a décidé d’accélérer ses vérifications.
- Nombre de contrôles en 2024 : environ 12 000
- Objectif pour 2025 : 30 000 contrôles
- Montant réclamé en cas de suspicion : entre 1 359 € et 1 500 €, en moyenne
Un risque accru d’erreur pour les consommateurs honnêtes
Avec cette stratégie plus agressive, Enedis ne se limite plus aux fraudes avérées. L’entreprise utilise désormais des algorithmes pour repérer aussi des « cas probables » — par exemple, une baisse de consommation soudaine ou une anomalie technique.
Mais cela entraîne un phénomène inquiétant : la hausse des faux positifs. Il suffit parfois d’un événement mineur pour être suspecté. Et le plus grave, selon les associations de consommateurs : il revient au client de prouver son innocence.
Comme le déplore l’UFC-Que Choisir, « c’est désormais au consommateur d’apporter la preuve qu’il n’a rien fait ». Or, les courriers envoyés sont souvent très flous : aucune précision sur la fraude supposée, aucune information sur comment contester la décision.
Des exemples concrets qui posent question
Plusieurs cas récents illustrent clairement les limites de ce système.
- Sylvain, 64 ans : sa maison était vide pendant la période concernée, les scellés du compteur intacts, mais il reçoit une facture de 1 500 €. Même après un constat technique valide, la procédure suit son cours.
- Marie-Isabelle et Hervé (Eure) : suite au raccordement de panneaux solaires, ils reçoivent une facture de 1 359 € pour manipulation suspecte. En réalité, le technicien Enedis aurait oublié de replomber correctement le compteur.
Le Médiateur national de l’énergie confirme l’augmentation des litiges : on est passé de 100 à près de 200 dossiers en un an. Si certaines fraudes sont bien réelles, de nombreuses procédures concernent des foyers sans historique problématique.
Enedis face à un dilemme : efficacité ou justice ?
Pour Enedis, l’enjeu est clair : sécuriser le réseau et limiter les pertes. Mais en multipliant les contrôles automatisés et les procédures rigides, cela expose des usagers innocents à une véritable épreuve.
Comment contester ? C’est là que les choses se compliquent. Faute d’informations claires ou d’interlocuteurs faciles à joindre, beaucoup de consommateurs se retrouvent piégés dans une présomption de culpabilité. Cela alimente la défiance envers un outil présenté à l’origine comme un progrès technologique au service des foyers.
Vers plus de transparence et de régulation ?
La nécessité de lutter contre la fraude est évidente. Mais elle ne doit pas se faire au détriment de la confiance et du bon sens.
Pour que le compteur Linky conserve son rôle d’outil moderne, il faut :
- Améliorer la communication autour des anomalies détectées
- Garantir le droit de défense en fournissant des justificatifs clairs
- Mettre en place des recours accessibles pour les erreurs humaines ou techniques
Un équilibre est possible : punir les fraudes avérées, mais protéger les consommateurs qui n’ont rien à se reprocher. D’ici là, si vous recevez un courrier suspect d’Enedis, ne tardez pas à contacter un médiateur ou une association comme l’UFC-Que Choisir. Car 1 359 € injustement dus, c’est une somme trop lourde pour rester silencieux.












Leave a comment